Ce midi, je rentrais d’un atelier avec des professionnelles de crèches où nous avons parlé d’écoute des enfants et de leurs besoins… notamment le besoin de manger. En structure, le moment du repas est souvent un moment de plaisir, où les papilles entrent en actions, les enfants s’autonomisent, la couleur est au rendez-vous… les professionnelles innovent de plus en plus pour permettre aux enfants de s’alimenter en respectant leurs besoins. Nous avons abordé le fait que, bien souvent, les enfants connaissent plus de crises et de moments difficiles (conflits, disputes…) juste avant les repas…
Non ? Chez vous, non ? Ca ne se passe pas comme ça ? A 11h50, ou à 18h30 ? Des heures parfois difficiles, n’est-ce pas ?
Eh bien mon petit garçon avait justement décidé de me mettre au banc d’essai juste en rentrant !
Pendant que je préparais à manger, il s’adonnait à son activité préférée : bricoler. Il adore ça, il construit souvent des choses en bois, il cloue, il visse… Il était en train d’imaginer transformer le petit charriot en bois que nous avons construit ensemble, afin de pouvoir l’utiliser pour transporter des choses plus grosses. Problème : nous n’avions pas les pièces de bois adaptées à la maison. Je le vois donc débarquer dans la cuisine, me demandant de scier une pièce dans toute sa longueur, chose impossible et dangereuse avec le matériel dont je dispose (seulement une scie pour tout dire ! Je suis une bricoleuse du dimanche !). Je refuse, par manque de temps et aussi parce que je sais que c’est voué à l’échec, en lui expliquant pourquoi. Première crise de larmes…. « Mais si ! Tu dois le faire ! ». J’écoute sa frustration, je mets des mots dessus … Nouveaux cris, pleurs… pendant un petit moment, il essaie de me forcer à faire ce que je n’ai pas du tout envie, il tempête. J’essaie de lui proposer d’autres solutions, comme aller acheter les pièces adaptées plus tard. Peine perdue ! Il commence à partir en vrille, il finit par jeter des choses dans la pièce par colère.
D’un seul coup, je prends un peu de recul… il est 12h20, il n’a pas encore mangé… et qu’est-ce que je disais déjà ce matin ?
Je l’ai donc vivement invité à venir manger illico presto (vive les carottes en bâtonnets et les morceaux de pommes), et …. En 3 minutes, le calme est revenu immédiatement, et j’ai retrouvé mon petit garçon dans son état normal, et le repas s’est passé dans une très bonne ambiance. Et surtout, il n’a plus parlé du tout de ce projet de bricolage après !
Que s’est-il passé ?
Le fait d’avoir faim a probablement mis son cerveau en état de stress, qui l’a rendu incapable de gérer une petite frustration. Et après, ça s’emballe et ça tourne dans le vide. Quand notre corps est en stress, nous affrontons beaucoup plus difficilement les petits stress de la vie quotidienne qu’en temps normal. Et comme le disait une participante ce matin… cela existe aussi chez les adultes ! Alors, chez un enfant, inutile d’attendre qu’il puisse se gérer tout seul en cas de faim intense.
Les besoins physiologiques, nous y faisons attention quand nos enfants sont petits…. Et après nous avons tendance à considérer qu’ils sont grands, et qu’ils peuvent bien attendre l’heure du repas. Ou de la récré. C’est vrai, c’est important de manger tous ensemble, c’est un moment agréable, de partage. Parfois, le repas se passe malgré tout mal parce que les enfants ont trop attendu, ils ont faim, ils dérapent, nous sommes énervés du coup (nous avons faim nous aussi !), cela génère des conflits…
Qui déteignent sur toute la famille.
On peut voir chaque personne comme possédant un réservoir affectif à l’intérieur d’elle même : satisfaire nos besoins remplit notre réservoir affectif, et nous permet de mieux gérer n’importe quelle frustration ou petit désagrément. Par contre, quand nos besoins ne sont pas satisfaits, notre réservoir se vide... et là, c’est beaucoup plus difficile d’encaisser la moindre chose désagréable. Et attention : on parle ici bien de besoins (et non de désirs), les besoins doivent être satisfaits pour que nous fonctionnions bien. Vouloir manger une barre de chocolat est une stratégie pour remplir un besoin, pas un besoin en soi. Il existe de nombreuses stratégies pour un même besoin.
Le plus simple est bien souvent de combler les besoins physiologiques des enfants au moment où ils se présentent. En matière d’alimentation, cela consiste à donner aux enfants à manger quand ils ont faim. Et cela ne veut pas dire forcément des gâteaux ou des barres chocolatées : des aliments sains font très bien l’affaire. Et pourquoi s’inquiéter s’ils mangent peu après au repas, s’ils ont déjà mangé un légume cru, un fruit, une compote sans sucre ajouté, des oléagineux …? Ils auront eu leur quota de vitamines, de nutriments.
À vous de donner les aliments qui vous semblent adaptés à leur santé, selon vos habitudes alimentaires. Par ailleurs, des enfants habitués à manger à leur faim et selon leurs sensations et envies alimentaires mangent la plupart du temps leur plat de viande ou de poisson, s’ils en ressentent le besoin physiologique, même s’ils ont déjà mangé un fruit. Parfois, c’est vrai, ils n’en mangeront pas, tout simplement parce qu’ils n’en ont pas besoin aujourd’hui. Cela change de jour en jour, les enfants font souvent des monodiètes pendant quelques temps, puis changent. Le corps est une machine merveilleuse qui nous oriente naturellement vers les aliments dont il a besoin pour se construire. Nous pouvons faire confiance aux enfants, ils sentent très bien leurs besoins alimentaires. Lorsque ce n’est pas le cas c’est souvent qu’un conflit récurrent existe autour de l’alimentation.
De nombreux parents mettent à disposition en permanence ou dans les moments critiques des morceaux de fruits, de crudités, des amandes, des noix, des noisettes (s’il n’y a pas de petits biensûr) en accès libre sur des tables basses par exemple. Les enfants viennent se servir quand ils en ressentent le besoin, ils apprennent ainsi à sentir et respecter leurs besoins alimentaires, qui ne sont finalement que des demandes du corps pour pouvoir bien se construire. Françoise Dolto disait qu’un petit enfant de 3 ans devrait manger toutes les 2 heures… quel décalage avec nos habitudes et notre culture alimentaires !
Vous allez m’accuser d’encourager le grignotage et l’obésité (si si, je vous vois venir). Et je vous répondrai que les spécialistes du surpoids alimentaire savent très bien que les personnes se suralimentent souvent car elles ne sentent plus très bien si elles ont faim ou juste envie de manger (pour d’autres raisons, émotionnelles bien souvent), et surtout elles ne savent plus sentir si elles sont à satiété. Tout l’enjeu est alors de renouer contact avec ses sensations corporelles autour de la faim. Chose que les enfants possèdent tout naturellement à leur arrivée sur Terre… ! Naturellement, les enfants s’arrêtent quand ils n’ont plus besoin de manger. À conditions que les aliments à disposition ne soient pas addictifs (chips, aliments fort sucrés ou riches en farine blanche, aliments contenant des additifs). Et qu’on les ait laissé s’arrêter de manger lorsqu’ils n’ont plus faim, même si leur biberon ou assiette n’est pas vide, afin qu’ils sachent reconnaître leurs sensations de satiété.
D’autres parents trouvent sinon avantage à avancer l’heure du repas (dans de nombreux autres pays, on mange le soir à 18h voire 17h30), et à passer par exemple le temps du bain / de devoirs après le repas, pour éviter que cela soit un moment tendu. Les enfants sont beaucoup plus disponibles pour les apprentissages, s’ils ont pu satisfaire leurs besoins au préalable : manger, boire, jouer, avoir du contact et de l’attention, pour n’en citer que quelques-uns.
Quand votre enfant semble partir en dérapage incontrôlé, en crise, la première question que vous pouvez vous poser est donc : ses besoins physiologiques sont-ils suffisamment satisfaits ? Comment puis-je l’aider à prendre soin de ses besoins ? A-t-il besoin de dormir, de boire, d’enlever un pull, de manger ?
Et vous, comment se passent les soirée et les repas chez vous ?
PS : les besoins physiologiques, alimentaires, ou la gestion des crises, c’est une problématique sur laquelle je vous accompagne depuis 10 ans.
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